MARIAGE TARDIF

 
Un film de Dover Kosashvili

Israël/France. 2001. Scénario : Dover Kosashvili. Photo : Dani Schneor. Musique : Joseph Bardanashvili. Producteur exécutif : Udi Yerushalmy. Durée : 1 h 40.

Avec Lior Louie Ashkenazi, Ronit Elkabetz, Moni Moshonov, Lili Kosashvili, Aya Steinovits Laor...
 
Tu seras un mari, mon fils. Zaza va sur ses trente-deux ans et son célibat n'en finit plus d'agacer sa famille. Entre deux rendez-vous pour le décider à choisir une épouse, notre héros prend la poudre d'escampette et rejoint sa maîtresse, Judith. Elle est divorcée et mère d'une petite fille. Alors, il l'épouse et on n'en parle plus ? C'est mal connaître la famille de Zaza qui sait apprécier les beaux culs mais pas les candidates au mariage déflorées…

Mariage pour le meilleur. Du cinéma israélien, on ne connaît généralement guère que le travail d'Amos Gitaï. Le réalisateur de "Kadosh " et "Kippour " s'illustre régulièrement en signant des œuvres humanistes et graves, reflets sans concession d'une âpre réalité. Ce refus du compromis fait école et se trouve au cœur de "Mariage tardif ". Un titre digne d'un vaudeville qui cache à peine l'ironie grinçante de ce premier film remarquablement maîtrisé. Le réalisateur, Dover Kosashvili, livre une comédie d'une rare justesse de ton, sans volonté affirmée de plaire, sans jamais se priver de dramatiser le plus possible les situations.

 
L'irrespect du traitement imposé à l'histoire et l'audace des situations sont d'une force insoupçonnée, a priori difficile à concevoir dans un film israélien. Les comédiens sont au diapason. Ici, les personnages détestables ne cachent pas derrière leur grosse carapace, un petit cœur qui bat. Ici, on baise plus qu'on ne fait l'amour. Ici, on se crache du fiel à la figure, on se griffe, on se menace. Ici, les paroles édifiantes d'un père ou d'une mère finissent par vous glacer les sangs. Et malgré tout cela, ici, on rit. Mais souvent jaune. Car le but recherché n'est pas d'étirer les péripéties au point de les faire tomber dans le burlesque et la caricature. Le plus grand sérieux reste de rigueur. L'absurdité transpire déjà des moindres faits et gestes : de la violence de parents décidés à marier coûte que coûte leur fils ; de l'impossibilité pour celui-ci de réagir et de s'affirmer ; des pressions incroyables du groupe, de la famille, des traditions…
 

Ce qui n'aurait pu être qu'une énième variation sur le thème du mariage forcé, devient, rapidement, l'instantané écoeurant de vérité d'une société forçant ses membres à une lasse résignation. Aucun des personnages de "Mariage tardif " n'est dupe du rôle à jouer ou subir. Pas de questionnement. Zaza s'efforce de repousser l'inéluctable. Sa famille, elle, fait bloc en sens inverse, dans l'unique but de répondre aux bons critères de l'ordre public. Le plaidoyer est évident sans être pour autant didactique ou pesant. Il y a dans ce film un subtil équilibre entre réalisme social et effets comiques, directement hérité des comédies italiennes des années quarante/cinquante, comme "Le voleur de bicyclette " de De Sica. Pas de sentimentalisme exagéré pour forcer le jugement. Mais un regard d'une impertinence et d'une crudité rares (voir la scène de sexe entre Zaza et sa maîtresse) qui fait de "Mariage tardif " une œuvre inattendue, insolente et drôle.

Christophe BENEY

HORAIRES ET SALLES
UTOPIA : 5 place Camille Jullian à Bordeaux.
En V.O. : le jeudi à 17h30; le vendredi à 12h10 (20f), le dimanche à 16h15; le lundi à 21h50 et le mardi à 18h.
Horaires du 12 au 18 décembre.
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